Big Bang Blockchain : la nouvelle révolution numérique”. Cet événement a regroupé des intervenants d’horizons divers et avait pour objectif d’explorer les cas d’usage de la blockchain. Il a permis de mettre en lumière un point essentiel : si cette approche technologique se généralise, elle sera à l’origine d’un bouleversement sociétal considérable.
Nous vous proposons, ici, un condensé des messages que nous avons retenus. Pour une lecture plus claire, nous avons accompagné la plupart des résumés de notre avis sur la question.
Gilles Babinet_, Digital Champion pour la France à la Commission Européenne_
David François - CTO de Paymium, Philippe HERLIN - Economiste, Jean-Yves ROSSI, Président de Canton Consulting, Etienne TATUR, COO de Moneytis
Selon les intervenants la blockchain présente plus de dangers que d’opportunités :
Notre avis : cette table ronde a beaucoup tourné autour de la blockchain Bitcoin, probablement en raison de la nature du panel. Selon nous, les autres approches et initiatives (Ethereum, par exemple) auraient mérité d’être mentionnées dans ces discussions car elles offrent des opportunités de construction d’écosystèmes interbancaires. Cela souligne bien la difficulté à faire émerger la blockchain en tant que technologie : il faut pouvoir s’affranchir de la première expérimentation qu’est Bitcoin.
Nicolas Loubet, CEO de Cellabz
Pour aller plus loin, le livre blanc “Blockchain and Beyond” de Cellabz est disponible au téléchargement.
Notre avis : la comparaison d’Ethereum avec un grand ordinateur mondial est bien trouvée. On entend souvent dire que la blockchain est une “base de donnée mondiale”, on voit bien ce qu’ajoute Ethereum à cela : le CPU ou la possibilité de stocker et exécuter des traitements.
La notion de DAO est aussi fondamentale pour comprendre comment les développeurs de ces technologies voient la société de demain : une société entièrement automatisée via des smart contracts.
Pierre-Alexis CIAVALDINI, Etudiant école 42 & CEO Résance
Notre avis : Bien que l’intervention ait commencé plutôt lentement, Pierre-Alexis a déroulé sa vision du monde de demain. Sa présentation d’un monde “sans pub” est très intéressante mais peut être challengée. La blockchain peut donner une autre dimension à tout ce qui est open source en traçant les contributions et surtout automatiser les rétributions (même si la question du calcul de répartition sera forcément épineuse...).
William El-Kaim, La fabrique des mobilités
Philippe Honigman, Backfeed.cc
Notre avis : Philippe est revenu en détail sur la notion de DCO “Organisation Collaborative Décentralisée”, qui est peu ou prou la même chose que DAO “Decentralized Autonomous Organization” avec en plus une notion de collaboration dans sa gouvernance, c’est là où il fait le lien avec les entreprises libérées.
Cette vision est intéressante car il permet de voir autre chose qu’une société automatisée totalement déshumanisée. La différence entre DCO et DAO montre qu’on peut décider de mettre la notion de collaboration dans ces contrats et ces organisations.
Yves Moreau, Professeur à l’université de Leuven (Belgique)
Notre avis : ce talk est à relier au précédent. L’automatisation de la gouvernance via la blockchain va avoir un impact fort sur la société et notamment sur le rôle de l’État. Par conséquent, le rôle du développeur est fondamental car tout ce qu’il écrit peut avoir des conséquences sur la société de demain. (Au passage, si vous voulez un plus long talk qui parle de la responsabilité de chacun, allez lire et voir Mike Monteiro "How Designers Destroyed the World ou la responsabilité du designer UX", vous pouvez changez “designer” par votre profession).
Notre avis : François a rappelé les possibilités de mécanismes “off-chain” qui permettent en théorie de contourner les limites actuelles d’une technologie comme la blockchain Bitcoin. Cette approche est intéressante quand on voit les problèmes qu’a la communauté Bitcoin à augmenter la taille des blocs.
Il aborde aussi le vote, usage souvent évoqué de la blockchain, mais n’a pas parlé de la problématique d’anonymisation du vote. Donc on voit bien ce qu’apporte la blockchain dans le cadre d’un vote ouvert (traçabilité, non-répudiation…), est-ce qu’on peut avoir les mêmes bénéfices dans un vote fermé ?
Primavera de Filippi, chercheuse au CNRS et Harvard
La blockchain est un protocole “trustless”. Elle nécessite la construction d’une couche de confiance pour favoriser l’adoption.
Or, la loi actuelle n’est pas adaptée à la blockchain et toute tentative de régulation conduirait à la disparition de cette dernière.
Dans la mesure où la blockchain est un outil de gouvernance, le smart contract fait office de loi.
La blockchain va-t-elle permettre de réduire les inégalités ou va-t-elle les renforcer ?
Tout dépendra de l’éthique des développeurs…
****Notre avis : Primavera ajoute aux thèmes évoqués la question fondamentale de la gouvernance du système lui-même.
Un cas pratique : si un développeur écrit un programme dont l’action est illicite. Qui est responsable ? L’auteur du code, la personne qui l’active, les miners qui font tourner le programme ? Si on considère qu’il faut punir son auteur, comment le retrouver dans un système de pseudonymat ? Et dans le cas où on le retrouve, il est impossible de retirer le programme lui-même ou d’empêcher son exécution.
Cette conférence fut très intéressante et on en retient notamment les enjeux de société induits par la blockchain :
Par ailleurs, la communauté Bitcoin vient de prendre une non-décision concernant l’augmentation de la taille du bloc. Ceci pourrait mettre en péril la monnaie Bitcoin. Si cela ne remet pas en cause la technologie blockchain, cela souligne l’importance et la difficulté de la gouvernance dans un système distribué (pour aller plus loin : "The resolution of the Bitcoin experiment").
Internet a longtemps été vu comme une zone libre et plus ou moins égalitaire. On a vu que c’était faux et qu’Internet était, en réalité, contrôlé par des entités centrales : états et multinationales. On assiste aujourd’hui au même bouillonnement et enthousiasme autour de cette nouvelle zone libre qu’est la blockchain. Vera-t-on l’histoire se répéter ou assisterons-nous à une transformation profonde de nos sociétés ? Difficile à savoir. Nous pouvons être des acteurs de cette histoire.
Vous souhaitez en savoir plus sur le sujet de la Blockchain ? Venez en discuter au Petit Déjeuner OCTO du 9 mars 2016 !